Université Saint-Louis - Bruxelles
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FILO1219 - Histoire de la philosophie de l'antiquité


[A. • 60 Th. • 6 crédits ECTS]


Horaire : Premier quadrimestre
le mardi de 15:00 à 17:00 au Préfecture P50

Second quadrimestre
le lundi de 16:00 à 18:00 au Préfecture P50
Professeur : Klimis Sophie
Langues d'enseignement : Français
Objectifs de l'activité : Les Grecs sont ces « intempestifs », sans cesse imités et réinventés par les philosophes ultérieurs. En se limitant au seul XXème siècle, on pourrait par exemple évoquer l'importance de l'étude des Présocratiques pour le dernier Heidegger, la réélaboration par Hannah Arendt de la distinction aristotélicienne entre la « vie active » et la « vie contemplative », la renaissance avec Perelman de la théorie de l'argumentation à partir d'une relecture de la Rhétorique d'Aristote, la relecture incessante des poètes, des historiens et des philosophes grecs qui traverse l'œuvre de Foucault, de son étude de « l'usage grec des plaisirs » à celle du « gouvernement de soi et des autres », jusqu'à aujourd'hui où un Alain Badiou revendique son platonisme et propose une « hyper-traduction » de la République. Mais c'est surtout à la relecture des Grecs par Cornélius Castoriadis que nous nous attacherons, en étudiant ce qu'il appelle la « création grecque », soit l'invention conjointe de la démocratie (entendue comme projet d'autonomie sociale) et de la philosophie (entendue comme interrogation illimitée), dans une période qui va d'Homère à la fin du Vème siècle. Nous envisagerons donc les deux figures majeures de la philosophie grecque, Platon et Aristote, en tant qu'ils viennent « après » cette intense période de création politique et philosophique, et que toute leur œuvre doit se comprendre en fonction d'elle. L'objectif du cours est donc d'introduire les étudiants au dialogue avec l'ensemble de la pensée grecque, non pas dans une perspective figée « d'histoire pour antiquaires » telle que Nietzsche l'avait déjà dénoncée, mais en tant que, chercher à comprendre les Grecs, c'est chercher à comprendre comment se sont instituées les formes du penser en Occident, dont nous sommes aujourd'hui encore tributaires et qu'il nous appartient de continuer à élaborer.

Prérequis : La connaissance du grec ancien est un atout mais n'est pas nécessaire. La spécificité de la conceptualité grecque et l'utilisation singulière que chaque philosophe fait de la langue grecque (création de néologismes, exploitation de toutes les formes du verbe « être », polysémies sémantiques et syntaxiques, etc.) seront présentées par le professeur de façon à pouvoir être comprises par tous les étudiants.

Contenu de l'activité : Le cours comportera 6 grandes parties :
Au premier quadrimestre, nous commencerons par étudier les textes poétiques qui constituent les références de base de toute la culture grecque : l'Iliade et l'Odyssée d'Homère, ainsi que la Théogonie et les Travaux et les Jours d'Hésiode. Si le Socrate de la République appelle Homère « l'éducateur de toute la Grèce » et combat si vigoureusement la représentation des dieux et des héros de l'épopée, c'est parce qu'Homère fournit à l'ensemble du monde grec, au moins jusqu'au Vème siècle, le cadre de ses valeurs, sa représentation de ce qui fait l'essence de l'humain, du cosmos, des dieux, de la justice et du monde commun. Nous étudierons aussi des textes tragiques comme le Prométhée Enchaîné d'Eschyle ou l'Antigone de Sophocle, compte tenu de l'importance de la tragédie pour l'autoinstitution de la cité démocratique athénienne, et de l'ampleur de la critique que lui adressera Platon (rappelons l'affirmation au premier abord incroyable selon laquelle c'est l'exclusion des poètes tragiques et comiques qui justifie que la cité idéale de la République soit la « meilleure possible »). Enfin, nous nous baserons notamment sur Thucydide pour comprendre l'histoire, le fonctionnement et les institutions politiques de la cité démocratique d'Athènes, ce qui nous sera nécessaire pour comprendre la philosophie politique de Platon et d'Aristote.
La seconde partie du cours sera consacrée aux penseurs grecs des VIe-Ve siècles avant Jésus-Christ, désignés sous le nom de penseurs présocratiques (II). Nous commencerons par analyser la construction de cette « catégorie » au XIXème siècle, qui fait de Socrate le « pivot » de l'histoire de la philosophie ancienne. Nous verrons aussi en quoi l'appellation de « philosophes », issue du pythagorisme, est rejetée par certains « présocratiques », comme Héraclite, qui préfère se désigner du nom de « sages ». Nous étudierons ensuite les différents courants de pensée repris sous le vocable de « présocratiques » : les cosmologies proposées par les penseurs de l'école de Milet (Thalès, Anaximandre, Anaximène), le statut du feu-logos, Un-Tout dans les fragments d'Héraclite, le poème de Parménide qui institue le principe logique d'identité et propose une nouvelle cosmologie, l'atomisme de Leucippe et de Démocrite, etc. Nous étudierons enfin ces étranges « présocratiques » contemporains de Socrate que sont les Sophistes, en nous concentrant sur la figure de Protagoras, dont la pensée dévoile les valeurs profondes de la démocratie athénienne.
Enfin, la troisième partie du cours sera consacrée aux dialogues de Platon (III) et c'est dans ce contexte que nous envisagerons Socrate comme « personnage conceptuel » (selon une expression empruntée à Gilles Deleuze), en le confrontant à l'énigme du Socrate « historique ». Nous aborderons la spécificité du choix de la forme-dialogue, qui, selon l'expression de Cornélius Castoriadis, « fait voir la pensée au travail », en montrant en quoi la création d'une forme d'oralité spécifique à l'écriture vient contre-balancer la théorie des « doctrines orales et ésotériques » de Platon, émise par des interprètes contemporains, dits de « l'école de Tübingen ». A travers l'analyse d'extraits de plusieurs dialogues, nous aborderons les thématiques centrales de la pensée platonicienne : l'invention de la « différence philosophique » par rapport aux politiques, sophistes, rhéteurs et poètes ; les questions de l'âme, de la justice, de l'Erôs, de la vertu, etc. Nous étudierons aussi les créations de pensée propre à Platon : l'institution de la méthode dialectique, les grands Genres du Sophiste; les Idées envisagées comme « figures du pensable ». Nous verrons finalement en quoi la philosophie platonicienne est bien, selon la description qu'en donne Alain Badiou, la constitution d'une scène philosophique qui parvient à rendre compossibles les registres hétérogènes de la politique, des mathématiques, de la poésie et de l'amour.
Au second quadrimestre, nous nous concentrerons d'abord sur la pensée d'Aristote (IV). Ce dernier est en effet l'inventeur de la philosophie telle que nous la pratiquons encore aujourd'hui, comme mettant en œuvre une forme d'argumentation qui ne recourt plus au mythe comme le faisait encore Platon, mais utilise une méthode diaporématique, qui, à partir d'un état de la question, dégage des « apories » et tente d'y apporter une solution. Aristote est aussi celui qui institue une délimitation tranchée des différentes « régions de l'être », dont il entreprend de dégager les principes propres. Nous nous intéresserons ainsi tout particulièrement à l'étude du devenir telle qu'elle est thématisée dans la Physique, au croisement entre ontologie, ousiologie et théologie dans la Métaphysique, ainsi qu'à la spécificité de la théorisation du domaine des « choses humaines » dans les traités éthico-politiques. Nous accorderons une attention particulière à la théorisation du langage humain d'Aristote, depuis l'étude de ses conditions anatomiques dans les traités biologiques, jusqu'à la différenciation entre langages apophantique, rhétorique et poétique.
La cinquième partie du cours (V) abordera les grands courants de la philosophie hellénistique, c'est-à-dire le stoïcisme, l'épicurisme et le scepticisme. Nous étudierons ces trois courants en les envisageant à la fois sous un angle théorique (logique, physique, éthique), mais aussi comme étant des pratiques de vie, des « exercices spirituels » dont l'importance a été mise en évidence par Pierre Hadot. Nous terminerons notre panorama de la philosophie ancienne avec Plotin, penseur du IIIème siècle après Jésus-Christ, fondateur du néoplatonisme (VI).
Méthodes d'enseignement : Cours ex-cathedra, ménageant un moment d'échange et de dialogue avec les étudiants en fin de séance.
Méthodes d'évaluation : Examen oral en fin d'année selon des modalités convenues avec les étudiants.
Bibliographie : Une bibliographie sélective et commentée pour chaque partie du cours sera distribuée durant l'année.
Autres informations : - Bibliographie sélective et commentée pour chaque partie du cours ;
-Textes d'auteurs

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