Transactions commerciales et relations sociales entre Grecs et Turcs à Bruxelles
La Grèce et la Turquie ont entretenu des relations très tendues au cours du XXème siècle. Par ailleurs, ces pays ont connu une importante émigration, notamment à destination de la Belgique. Quelles relations leurs ressortissants ont-ils entretenues à Bruxelles lorsqu'ils ont été amenés à se côtoyer ? C'est la question que se pose l'anthropologue Katerina Seraïdari dans le numéro 53 de Brussels Studies en se penchant particulièrement sur les épiceries tenues par les personnes originaires de ces pays.
Entre 1955 et 1961, 10195 Grecs reçoivent un permis de travail belge. Ils migrent essentiellement pour travailler dans les charbonnages. A l'arrive des Turcs qui les suivent de peu, ils matrisent dj la langue du pays et ont eu le temps de s'initier au mtier de mineur ainsi qu'aux codes culturels locaux. Ils tissent avec ces nouveaux immigrs des liens de solidarit fortement teints de hirarchie.
En se basant sur le propre regard des membres des populations d'origine turque et grecque, l'auteure trace les contours d'une cohabitation bruxelloise. La grande majorit des personnes interroges considre qu'il n'existe pas de problmes relationnels entre les deux communauts. Grecs et Turcs se sont abondamment ctoys dans le cadre de leur vie professionnelle, et continuent de le faire, notamment dans le cadre du commerce de proximit, au travers d'piceries vendant des produits en provenance de Grce et de Turquie. Ils ont aussi frquent les mmes quartiers, coles, syndicats, piceries et cafs.
Des liens durables n'mergent cependant pas et, une fois une certaine ascension sociale acquise, - et avec elle le dplacement dans un quartier favoris et la frquentation d'un milieu plus ais, - ces relations de voisinage et de camaraderie se sont dsagrges.
En filigrane de ce texte apparat la question, maintes fois pose Bruxelles, de la (non-) importation de conflits ou rivalits par le biais des mouvements transnationaux de populations.